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dimanche 31 juillet 2016

On l’a fait !

Le matelot est soulagé : on l’a passé et on l’a passé sans problème. 
Faut vous dire que nous avions devant nous une sorte de mont Blanc de la batellerie : le plus long tunnel fluvial de France : 5 670 m. de long, presque 6 km, tiré par le dernier toueur en activité : le souterrain de Riqueval (souvenez-vous que « tunnel » est un mot anglais qui n’était pas encore arrivé chez nous au début du XIXe siècle).
Faut vous dire que lorsque ce canal fut terminé, sous la dictature du Corse, les péniches étaient tractées par une dizaine d’hommes. Il leur fallait jusqu’à douze heures pour traverser ce souterrain ! Comme c’était un peu long, un ingénieur ingénieux eut l’idée lumineuse de fabriquer un toueur. 
Un  toueur, c’est un remorqueur qui avance en avalant une chaîne (posée au fond) par un bout et en la recrachant par l’autre. On ne fait pas des pointes de vitesse avec ce système, mais ce n’est pas le but. Il peut touer ainsi jusqu’à 30 péniches de commerce !
Donc on installe un toueur dans le tunnel de Riqueval. À l’époque, le seul moyen plus efficace que les hommes pour tirer des bateaux ? La vapeur !
Essayez de vous imaginer la scène : prenez le tunnel du métro. Les rails sont remplacés par la surface de l’eau. Une grosse machine avance en cliquetant et la cheminée crache d’énormes volutes de fumée. Dans un tunnel sans aération. Ça tousse, derrière le toueur ! Ça n’était pas possible, il a fallu remplacer la vapeur par la fée électricité.
Le toueur.
La chaîne.

Et le voilà ce fameux toueur. Il faut laisser trente mètres entre chaque embarcation (nous serons seuls, dommage pour le folklore). Et c’est parti !
C’est vrai que ça n’avance pas vite, mais ça avance : il fallait 12 heures à bras d’hommes, il ne faut plus que 1 h 30 maintenant, on ne va pas se plaindre ! 

On y entre. Les cordages bleus : 2 x 30 m. "nécessaires et obligatoires",
mais inutiles !

On y est en plein. Manque le bruit pour avoir l'ambiance.

Le trajet parcouru. À mi-chemin on ne voit le jour ni devant ni derrière.

Bon, le matelot se plaint, mais le matelot se plaint toujours dans les tunnels. Le matelot n’aime pas les tunnels. Alors, 1 km ou 6 km, quelle différence ?… Assis, moteur coupé, dans l’éclairage artificiel qui ne montre que des pans rocheux blanchâtres ou de briques rosâtres, nous avons une pensée pour l’équipage de ce toueur : un mécanicien et un matelot, qui passent plusieurs heures par jour dans ce boyau. Et une autre pour les pauvres gens qui ont creusé ce terrier à la pelle et à la pioche !…


On est sorti. L'équipage est content.
En sortant, une suite assez rapprochée d’écluses nous a conduit jusqu’à Cambrai où nous resterons trois jours. 
L'écluse dessus, l'Escaut dessous !

Note triste de ce voyage : nous avons rencontré un jeune chevreuil tombé dans le canal qui n’arrivait pas à en ressortir. Il n’y a aucun moyen pour ces animaux de remonter sur la berge qui est cimentée, sauf à trouver un endroit abimé. Il y en a quelques-uns, mais comment explique-ton ça à un chevreuil ?
Nous sommes à Cambrai pour trois jours.

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