C’était en août, il y a quatre ans. Nous étions sur l’Yonne, avalant sur cette belle rivière qui ne sait pas qu’elle est un fleuve. Dans une dérivation, petit canal qui conduit à une écluse, nous attendions que l’écluse de Néron (si, si !) s’ouvre. Autour de nous la campagne, sous un ciel bleu blanc vibrant de chaleur. Le ronron du moteur couvre les bruits des cigales et autres criquets. Devant nous, l’Ardito, attend lui aussi ; nous sasseront ensemble. Un léger souflle d’air, trop léger pour nous rafraîchir, nous pousse doucement d’un côté, de l’autre. Attente, patience, engourdissement. L’été.
Soudain, un silence inquiétant : le moteur de l’Ivanka vient de s’étouffer. Pouf, pouf, pouf… pouf ! On entend les criquets et les cigales, mais on s’en fout. ¿ Qué pása ? Je tente de redémarrer. Rien. Aïe, aïe, aïe ! Serait-ce un souvenir en gestation ? (chaque fois qu’il nous arrive un mésaventure je console Fabi en lui disant : ça nous fera un souvenir !). Une deuxième tentative inutile. Le moteur ne veut rien savoir. La VHF est allumée, je tente ma chance et appelle le bateau devant nous. L’Ardito ? Je suis juste derrière vous. Je suis en panne. Pouvez-vous m’aider ? La réponse est immédiate : On va vous remorquer jusqu’au quai d’attente.
L’Ardito vient se mettre à couple ; amarrage. En avant lentement, il nous mène jusqu’au quai d’attente où nous nous amarrons. Ouf ! ça, c’est fait. Il nous reste à les remercier. Nous prenons leur adresse, Claude et Evelyne et la grand-mère Guilette. Merci et bonne route. Ils disparurent derrière les portes de l'écluse, nous laissant seuls au milieu de nulle part, mais amarrés à quai.
Quatre ans plus tard, le 6 août 2014, nous sommes assis dans leur salon à Saint-Mammès. Evelyne, Guymette la super grand-mère qui a connu la traction chevaline sur les péniches et Claude, plus Chantal et Claude un couple qu’ils ont rencontré lors de leur récent voyage et nous. Trois mariniers et quatre daterre qui font semblant.
Or, devinez de quoi parlent des gens qui vivent sur un bateau quand ils se rencontrent ?
Nous avons passé un chaleureuse soirée.
Ah ! vous voulez savoir comment s’est résolu notre problème. Eh ! bien, jusque comme je cherchais qui je pourrais bien contacter, je reçois l'appel d’un client – et néanmoins ami – suisse qui me demande si je peux faire un guidage de trois jours en Périgord (c’est un autocariste qui organise des voyages). Tout en rechignant parce que je n’ai plus envie de faire ce genre de contrat, je lui demande son avis sur ma panne (c’est un mécanicien professionnel). Question : ton moteur, il a fait Pouf, pouf, pouf…pouf ou plutôt poufpouf… poufpouf… pouf. Je penche pour la première version. Alors, ce n’est rien, me dit-il. Tu fais ceci, tu tournes celà, tu resserres ce serre-joint, et c’est bon.
– Merci Francis ! J’essaie et je te rappelle.
J’essaie, ça marche !
Je l’ai rappelé et j’ai accepté de faire ses trois jours de guidage. Comment refuser quand on a son mécanicien personnel en Suisse ?